Le 16 juin 1896, les chantiers Dubigeon de Chantenay-sur-Loire lancent après six mois de construction un trois-mâts barque de 50,96 mètres de longueur, à la coque toute en acier.Son armateur, Monsieur Fernand Crouan l'exploite aussitôt vers le Brésil, vers ce port de Belem à qui le navire doit son nom.

Avec ses 675 tonnes de port en lourd, le Belem rapporte de Parà des fèves, artimon du cacao et des Antilles, des rhums et des sucres. Treize hommes arment le navire, trois armateurs nantais et six capitaines se succèdent au long de ses trente-trois campagnes transatlantiques. Diverses péripéties marquent sa carrière commerciale :
Un incendie lors de son premier voyage, un abordage sur rade de Saint-Nazaire en 1898; le Belem échappe même par un extraordinaire concours de circonstance à l'éruption volcanique de la Montagne Pelée à la Martinique en 1902! La concurrence de la navigation à vapeur sonne le glas des petits voiliers antillais.

Le Belem est vendu au Duc de Westminster le 11 février 1914 et devient yacht de long cours. Il est doté de deux moteurs et de deux hélices, la dunette est surélevée et entourée de balustres, un faux-pont est construit dans l'ancienne cale, des cabines et un grand roof sur le pont sont aménagés et richement décorés d'acajou de Cuba.

En 1921, le brasseur irlandais A.E. Guiness devient propriétaire du navire et le rebaptise Fantôme II. Sous les couleurs de son nouvel armateur, Fantôme II fait un tour du monde, navigue au Spitzberg et fait escale à Montréal pour le couronnement de Georges VI. Acquis par la Fondation Cini en 1951, il mène une carrière de navire école pendant treize ans à Venise, sous le nom de Giorgio-Cini. Ses vergues de grand-mât sont déposées pour qu'il soit gréé en trois-mâts goélette.

Donné aux carabiniers qui n'en trouvèrent pas l'utilisation, il est vendu pour la lire symbolique aux chantiers navals de Venise en contre partie de sa remise en état. Il est finalement mis en vente en 1978 ayant retrouvé son gréement de trois-mâts barque doté d'une nouvelle mâture en acier. Le sort du Belem ne pouvait laisser indifférente l'Association pour le sauvetage et la conservation des anciens navires français. Celle-ci lance une souscription et fait appel à des organismes d'ampleur nationale. Un projet commun de l'Union Nationale des Caisse d'Epargne de France et de la Marine Nationale voit le jour. Un protocole d'achat est signé et, le 15 août 1979, le Belem quitte Venise pour être remorqué jusqu'à Brest ou l'attend un important chantier de restauration. Un an plus tard, les Caisses d'Epargne font don du voilier à la Fondation Belem créée le 11 mars 1980 et reconnue d'utilité publique. Leur effort est récompensé par l'oscar du mécénat (1980) et par le phénix de la culture (1986). Le BELEM a été classé monument historique le 27 février 1984.